Article déposé le 31 mai 2010

De récents reportages télévisés ont traité de la prostitution des mineurs pubères ou impubères en France ou à l'étranger. Il ne s'agit ni plus ni moins de pédophilie. Les clients qui veulent se donner bonne conscience en expliquant que grâce à eux, ses enfants ne sont pas dans la misère économique sont des pédophiles c'est à dire des criminels. J'ai été amenée à suivre plusieurs d'entre eux qui avait déjà été condamnés au moins une fois. Il y avait donc déjà eu des victimes.

Alors, intervenir en amont auprès d'adultes ayant des fantasmes sur des enfants, sans qu'il y ait passage à l'acte c'est-à-dire avant qu'ils aient fait des victimes m'a grandement intéressée. C'est une conception de la prévention novatrice qui mérite d'être connue et reconnue.

L'histoire de Pierre

Mes premiers échanges avec Pierre se feront par mails.

Pierre se présente comme étant un pédophile abstinent. Il n'est jamais passé à l'acte mais il fantasme régulièrement sur de jeunes garçons. Ces fantasmes sont de plus en plus envahissants. Pierre cherche donc sur internet des groupes de discussion. Il en trouvera un, très actif à l'époque, sur internet.

De ces échanges, il trouvera le chemin de la déculpabilisation au point de recevoir des images pédopornographiques mettant en scène des garçons. En effet, sur ce forum il rencontre des pédophiles qui expliquent à quel point leurs victimes sont heureuses et épanouies de cette relation. C'est en niant la souffrance de leurs victimes qu'ils se déculpabilisent. Pierre est donc confronté à ce qu'il veut croire des récits des pédophiles actifs et à ce qu'il entend dans les mass médias sur la souffrance des victimes. De cette ambivalence va naître de la souffrance si bien que Pierre tentera de se suicider à plusieurs reprises.

C'est ainsi que Pierre va chercher, toujours sur internet, une autre écoute auprès de l'association de prévention de la pédophilie et de l'inceste dans laquelle je travaillais. Mon premier objectif a été de créer un climat de confiance avec Pierre. De cette façon, il a progressivement commencé à exprimer sa souffrance mais aussi ses stratégies pour être au contact d'enfants comme par exemple aller au cinéma lors des séances d'Harry Potter. Pendant que les jeunes spectateurs regardaient l'écran, lui les regardait…Une autre partie importante de mon travail a consisté à l'accompagner dans sa réflexion sur le ressenti des victimes. Progressivement Pierre a reconnu la souffrance des victimes jusqu'au jour où il s'est senti prêt à commencer une thérapie. C'est alors que je l'ai orienté là encore chez le Docteur COUTANCEAU.

C'est en lui reconnaissant une réelle souffrance et en lui offrant un espace de parole sans jugement aucun que Pierre a pu avancer dans sa réflexion sur le ressenti des victimes et qu'ainsi il a voulu entreprendre une psychothérapie.

Pour conclure

Les pédophiles, abstinents ou non, sont très organisés sur internet. Il n'y a pas que les sites pédo-pornographiques où l'on peut acheter, vendre ou échanger des fichiers.

Ils se sont constitués en réseau international où ils dialoguent entre eux sur des forums de discussion faciles d'accès, d'autres cryptés. Ils échangent leurs idées, leurs désirs de modifier les lois pour abaisser l'âge de la majorité sexuelle. Certains racontent leur pseudo histoire d'amour avec des enfants ce qui va avoir l'effet de favoriser le passage à l'acte des pédophiles abstinents car les récits sont angéliques. D'autres sont nostalgiques des années 70…Ils connaissent parfaitement les lois, et flirtent avec la légalité. Ils émettent parfois le désir d'organiser des manifestations pour faire changer les lois…

C'est pourquoi, je pense qu'il est nécessaire de développer cette prévention novatrice sur internet notamment pour permettre aux pédophiles abstinents de s'exprimer et de sortir de ces réseaux qui viennent faciliter le passage à l'acte en niant le traumatisme des victimes. Le discours de ces réseaux est que si les victimes souffrent c'est à cause de la société qui interdit "l'amour" entre un enfant et un adulte.